Avec Marie-Josèphe Rancon
Avec les possibilités offertes par les pistes audio, les animations et les jeux des livres numériques, nos enfants ont-ils encore besoin qu’on leur lise des histoires ? Bonne nouvelle, la réponse est oui ! La fonction de parent-conteur – avant, pendant et après la lecture – connaît juste quelques évolutions… Décryptage avec Marie-Josèphe Rancon, orthophoniste.
Marie-Josèphe Rancon insiste sur le rôle primordial des parents dans le choix du livre numérique. “Il faut prendre en compte l’âge auquel est destiné l’ouvrage, s’assurer de sa qualité et, ce qui le différencie du jeu, de sa dimension d’objet-à-lire”, recommande-t-elle. On le reconnaît, ce n’est pas un petit travail, le secteur en étant à ses balbutiements et les prescriptions en la matière encore trop rares. Néanmoins, pour vous aider à bien choisir un livre numérique, n’hésitez pas à consulter “Les ressources pour s’orienter” de ce guide.
Attention, c’est au cours de la phase de lecture que beaucoup de choses se jouent. Dans ce nouveau rôle de parent-conteur, tout va être une question de bonne distance. “Il va s’agir de laisser de l’espace à l’enfant pour qu’il puisse se forger sa propre expérience, considère Marie-Josèphe Rancon. Mais en même temps, le parent doit être là pour, par exemple, lever les difficultés liées à l’ergonomie ou à l’animation. Le simple parent-conteur devient parent-conteur-passeur.”
Les livres numériques induisent un autre changement : le parent est presque aussi novice que son enfant devant l’objet. “Dans cette disposition, la hiérarchie est abolie, souligne l’orthophoniste. Parents et enfants se retrouvent à égalité devant l’histoire. Il existe un étonnement un peu merveilleux à découvrir ensemble un nouvel outil. Cela peut créer une belle complicité.”
Dans les contes russes, une comptine introduit et clôt l’histoire afin d’établir des frontières entre le monde réel et le monde imaginaire. Pour Marie-Josèphe Rancon, avec les livres numériques, les parents ont désormais aussi cette mission de ramener, à la fin de leur lecture, leurs enfants dans le présent. “Pour cela, ils peuvent endosser un rôle de ‘discutant’, explique-t-elle. Pour ramener l’enfant à la réalité, il est possible, par exemple, de discuter des questionnements sur la vie présents dans le récit. Là, encore, cela renforce la complicité entre eux.” Et cela met fin à une inquiétude parentale courante : oui, nos enfants ont toujours besoin de nous pour lire des histoires !
Orthophoniste, Marie-Josèphe Rancon est licenciée en linguistique appliquée “Genèse et fonctionnement du langage”. Elle conseille les rédactions des magazines de fiction Bayard Jeunesse : J’aime lire, Mes Premiers J’aime lire, Les Belles Histoires et Tralalire.