Par Sylvie Vassallo
Le livre numérique condamne-t-il la lecture des livres papier ? Aimer les livres papier exclut-il l’usage des livres numériques ? Pour Sylvie Vassallo, directrice du Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis, il n’en est rien, bien au contraire : “Il faut apprendre à connaître ces deux mondes, à profiter de ce que chaque support peut proposer.”
Avec les livres papier, il existe tout d’abord une dimension physique : tourner les pages, prendre conscience du grammage du papier, du format de l’ouvrage…Tout ceci participe au plaisir de la lecture. “Le livre papier induit également une concentration différente, explique Sylvie Vassallo. Avec sa couverture, son verso, il porte en lui une notion de finitude. Le petit lecteur est installé dans un espace borné d’un début et d’une fin.” Cet espace défini peut donner un sentiment de sécurité à qui s’en empare. “Le livre papier favorise le temps, l’intimité et la concentration”, résume Sylvie Vassallo.
Avec les livres numériques, l’enfant découvre une expérience complémentaire. De par ce qu’ils proposent – images, textes, animations, photos, sons – “ils livrent une multitude d’écritures combinées”, souligne Sylvie Vassallo. Ainsi, de lecteur, l’enfant devient “lect-acteur” : non seulement il lit un texte, mais il a la possibilité d’agir dessus. Et ses actions ont une influence sur la narration elle-même. “Alors qu’avec les livres papier la seule action de l’enfant consiste à tourner les pages, ici, son engagement est plus évident”, précise Sylvie Vassallo.
Une bibliothèque de livres numériques s’adapte bien aux voyages tandis que celle de livres papier encourage une lecture plus intime et statique. Pour Sylvie Vassallo, voguer entre les deux supports permet “d’aiguiser le sens critique et l’imaginaire de l’enfant”. Posséder une histoire dans sa version numérique et papier met au jour les différentes modalités narratives mises en œuvre autour du même récit. Elle évoque ainsi le livre Fourmi, d’Olivier Douzou, enrichi de jeux dans sa version numérique. “On peut s’amuser à comparer les images et les couleurs utilisées pour chaque version”, propose-t-elle. Prenant l’exemple d’Hervé Tullet qui, à partir d’un même univers, a composé un livre, un jeu et une application, elle y voit un moyen pour l’enfant de se projeter : “Et moi, à la place de l’auteur, qu’est-ce que j’aurais imaginé ?”
Économiste et bibliothécaire de formation, Sylvie Vassallo est la directrice du Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis depuis 2001.